Sommaire
- Un début d’année en hausse pour le pétrole
- Drill, baby, drill
- L’évolution sous-jacente de l’offre et de la demande laisse plutôt présager une suroffre
- Trump sauvera-t-il le prix du pétrole en sanctionnant plus sévèrement les exportations?
Un début d’année en hausse pour le pétrole
Après la correction du prix du pétrole au second semestre de 2024 du fait de la suroffre, le prix du baril de Brent a soudain grimpé en début d’année de 70 à 80 USD. Au départ, ce rebond a été imputé à la vague de froid qui sévissait sur l’Amérique du Nord et l’Europe, mais peut-être faudrait-il plutôt l’attribuer à un dernier acte surprenant de l’administration Biden, à savoir le renforcement des sanctions contre la Russie visant les exportations de pétrole de cette dernière à destination de la Chine et de l’Inde, notamment à travers un boycott d’une plus grande partie de la flotte de navires-citernes russes. Ces dernières années, l’administration Biden n’avait pas été trop regardante à l’égard du respect des embargos sur les exportations pétrolières de la Russie, de l’Iran et du Venezuela, de manière à éviter une pression à la hausse sur les prix du pétrole. Le marché s’attend de la part du président Trump à une attitude plus sévère à l’égard de l’Iran et du Venezuela, mais est-ce compatible avec son ambition de faire baisser les prix de l’énergie et de l’inflation?
Drill, baby, drill
Durant sa campagne électorale, Donald Trump a promis de réduire l’inflation à travers une baisse des prix de l’énergie grâce à une augmentation de l’extraction de pétrole et de gaz aux Etats-Unis. La production pétrolière et gazière américaine a déjà fortement augmenté ces dernières années, même si l’administration Biden voulait tout de même, pour des raisons environnementales, limiter l’expansion débridée des projets d’extraction de pétrole de schiste. Donald Trump veut quant à lui renverser la vapeur à travers un assouplissement de la procédure d’obtention des permis, également pour les extractions de pétrole de schiste et en haute mer. Vu la durée des projets, l’offre n’augmentera que d’ici quelques années, et uniquement si les prix de l’énergie restent suffisamment élevés que pour convaincre les entreprises pétrolières et gazières de consentir ces investissements. La véritable ambition de Trump n’est donc peut-être pas de faire baisser les prix de l’énergie, mais bien d’encourager le secteur de l’énergie américain à produire davantage aux prix actuels, et donc d’étendre encore la domination énergétique américaine de manière à ce que les exportations de gaz et de pétrole à destination de l’Europe deviennent pour les Etats-Unis une source croissante de revenus.
L’évolution sous-jacente de l’offre et de la demande laisse plutôt présager une suroffre
Indépendamment de la politique de Donald Trump, le marché pétrolier évolue plutôt en direction d’une offre excédentaire. En partie du fait de la transition énergétique, la demande mondiale n’augmente plus que de 1% par an. Même en Chine, en dépit d’un taux de croissance économique de 5% l’année dernière, la consommation de pétrole augmente à peine du fait de la rapidité de l’électrification et de la transition vers les véhicules électriques.
Ces dernières années, l’offre des pays extérieurs à l’OPEP comme les Etats-Unis, le Canada, le Brésil, la Guyane et autres a fortement augmenté. Les pays de l’OPEP+ (y compris la Russie, le Kazakhstan, etc.) ont durant quelques années repoussé la menace d’une offre excédentaire en limitant leur production jusqu’à concurrence de 6 millions de barils par jour, soit plus de 10% de leur capacité. Cependant, pour éviter de voir leur part de marché diminuer à l’infini, les pays de l’OPEP+ ont à présent décidé de relancer progressivement sur le marché une partie de leur capacité de réserve (2,2 millions de barils par jour entre avril 2025 et septembre 2026). En combinaison avec la croissance attendue de la production des pays extérieurs à l’OPEP (également 2 millions de barils par jour en 2025) et une augmentation de la demande d’à peine 1 million de barils selon les prévisions, nous nous dirigeons donc d’ici la fin 2025 vers une situation de capacité excédentaire et donc de pression sur les prix.
Trump sauvera-t-il le prix du pétrole en sanctionnant plus sévèrement les exportations?
En marge du mécanisme fondamental de l’offre et de la demande, les prix du pétrole subissent aussi souvent l’influence des tensions géopolitiques, en particulier celles qui sévissent au Moyen-Orient et en Russie. Si le récent cessez-le-feu entre Israël et le Hamas (et, avant cela, le Hezbollah) acquiert un caractère permanent, la prime de risque actuellement incluse dans le prix du pétrole pourrait diminuer. Le principal risque au Moyen-Orient était que le conflit s’étende à l’Iran, bloquant dans le pire des cas les exportations pétrolières en provenance du golfe Persique, mais ce risque semble à présent s’atténuer.
Cependant, cela n’empêchera peut-être pas Donald Trump d’imposer à nouveau l’embargo décrété à l’époque contre l’Iran, et éventuellement de faire de même pour le Venezuela. Il pourrait aussi renforcer le contrôle des sanctions contre la Russie afin de faire pression sur Poutine en prévision des négociations imminentes avec l’Ukraine, même si cela signifie que si un accord de paix est trouvé, il inclura sans doute la levée de certaines sanctions…
Si les embargos à l’égard de l’Iran, du Venezuela et de la Russie sont véritablement imposés, les autres pays de l’OPEP+ pourront renoncer à leurs limitations de production sans que cela n’affecte trop le prix du pétrole, ce qui serait une bonne nouvelle pour l’Arabie Saoudite, plutôt pro-américaine. Quant à Donald Trump, cela lui permettrait de stimuler sa propre production pétrolière américaine et de conquérir des parts de marché. Il devra cependant veiller à ne pas compromettre ainsi son autre ambition, qui est de maîtriser l’inflation. Autrement dit, il devra faire en sorte que les prix du pétrole n’augmentent pas trop, éventuellement en modulant sa politique de sanctions. Moralité : l’évolution future du prix du pétrole dépend dans une large mesure d’un seul homme : Donald Trump.
Chiffres clés du 21/1/2025
|
Index |
Clôture |
+/- |
Depuis début 2025 |
Belgique: Bel-20 |
4268,10 |
-0,09% |
0,08% |
Europe: Stoxx Europe 600 |
525,98 |
0,40% |
3,62% |
USA: S&P 500 |
6049,24 |
0,88% |
2,85% |
Japon: Nikkei |
39027,98 |
0,32% |
-2,17% |
Chine: Shangai Composite |
3242,62 |
-0,05% |
-3,26% |
Hongkong: Hang Seng |
20106,55 |
0,91% |
0,23% |
Euro/dollar |
1,04 |
0,00% |
0,44% |
Brent pétrole |
79,54 |
-0,33% |
6,42% |
Or |
2740,35 |
1,24% |
4,38% |
Taux belge à 10 ans |
3,12 |
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Taux allemand à 10 ans |
2,48 |
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Taux américain à 10 ans |
4,56 |
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Source : Refinitiv Datastream